Comment l'ai-je attrapée ? Je n'en ai aucune idée.
Tout a commencé par de la fièvre dans la soirée du dimanche 18. Une forte fièvre, brutale, quasiment d'une minute à l'autre. Etrange ça ... De la fièvre, des sueurs, des frissons qui vous envahissent alors que vous regardez tranquillement un film.
Dans la mesure où l'on est contagieux 24 heures avant le début des symptômes, j'étais donc contagieux la veille lors du Conseil Municipal extraordinaire du 17 !! Je m'excuse à posteriori auprès de l'ensemble de mes collègues du Conseil mais je n'étais pas au courant ! Et puis heureusement je suis resté peu de temps puisque Mme Fourneyron me refusait la parole. Sans le vouloir, son manque d'écoute a sans doute été utile au principe de précaution !! Quel talent !
Alors c'est comment la grippe A ?
Ca commence par deux jours de fièvre et de frissons. Je ne m'en suis pas vraiment préoccupé le premier jour et je suis allé travailler dans mon service de réanimation sous aspirine et paracétamol. Mais d'emblée j'ai appliqué les consignes de prévention : masque et lavage des mains. Puis rapidement je me suis confiné dans mon bureau ( qui avait bien besoin de rangement) en attendant le résultat du test H1N1 fait par précaution du fait de ma proximité avec des malades fragiles. A ce moment là, je suis assez incrédule. La grippe A, pourquoi moi ? Dès le lendemain, branle-bas de combat ! Le laboratoire de virologie, la médecine du travail me cherchent... Mon test est positif. J'ai la grippe A. Immédiatement je suis mis en quarantaine. Tous les membres du service de réanimation sont soumis à des mesures préventives : port du masque, précautions d'hygiène renforcées. Je m'en excuse aussi auprès d'eux car pendant 48 heures il va y avoir une ambiance étrange dans le service : réunions pendant lesquelles tout le monde est masqué, inquiétudes pour ceux qui ont des petits enfants, consultations pour ceux qui ont des problèmes de santé, etc. Mais tout le monde prends cela avec philosophie et professionnalisme.
Pour moi, après les deux jours de fièvre, viennent deux jours de toux intense. Une toux qui décolle les muqueuses, qui fait penser que les bronches ne vont pas résister, qui brûle les poumons. Une phase vraiment pas agréable et qui fait douter de ce qui va se passer. Mieux vaut avoir un bon état respiratoire !
Les deux jours suivants sont ceux des douleurs musculaires. J'ai les jambes comme au lendemain d'un marathon. Et vu l'intensité j'ai du battre mon record ! A ce moment là je ne peux m'empêcher de penser que je vais faire un syndrome de Guillain Barré. Ca fait peur ça .... Heureusement tout régresse progressivement.
Tout est maintenant rentré dans l'ordre et me revoilà en forme. J'ai survécu à la grippe A.
Certains de mes collègues mal intentionnés me disent que le risque est surtout important pour les jeunes... Ils ont raison. Mais c'est un peu cruel de me dire ça. Ils n'ont vraiment aucune compassion !
Que retenir de cette expérience ?
Tout d'abord que ceux qui disent un peu bêtement que la grippe A est une "grippette" ne l'ont pas eue et se trompent. Je ne sais pas s'ils me croient mais leur affirmation est fausse et ne sert à rien. L'intensité des signes est évidente et je suis certain qu'ils peuvent avoir des conséquences chez des populations à risque.
Deuxième constatation, les mesures de prévention marchent. A priori, je n'ai contaminé personne ni dans mon entourage ni au sein du service de réanimation. Le port du masque, le lavage des mains, l'isolement sont simples à mettre en oeuvre et efficaces.
Dernière interrogation et la plus polémique actuellement. Faut-il se faire vacciner ? Je n'ai pas à me la poser à titre personnel puisque me voilà immunisé avant même d'avoir pu être vacciné.
Mais ce n'est pas une raison pour éviter cette question. La question est, en fait, de choisir entre deux risques faibles : Le risque d'une complication grave de la grippe A qui est certain mais faible et imprévisible et le risque lié à la vaccination qui est potentiel, faible et lui aussi imprévisible.
Je comprends que beaucoup de personnes s'interrogent et aient du mal à choisir entre les deux. La lecture des données médicales issues de l'expérience de nos confrères de l'hémisphère sud qui ont vécu la pandémie avant nous sont en faveur de la vaccination. C'est un élément de la réflexion pour la vaccination. Deuxième élément, la gravité potentielle chez les personnes à risque (au sens large). Elle me semble également pencher pour la vaccination. Enfin, il me semble qu'il faut se poser la question du risque à titre individuel mais aussi collectif. Si je n'ai pas trop eu d'inquiétudes pour moi-même lors de cette grippe, j'en ai eu pour mon entourage et en particulier pour mes deux filles : Jeunes et en bonne santé mais potentielles candidates à une forme grave. C'est la raison pour laquelle il me semble que pour les professionnels de santé, pour ceux qui sont en contact avec des enfants ou des adolescents, la responsabilité impose de dépasser la réflexion personnelle et de prendre le faible risque de la vaccination plutôt que celle difficile à supporter d'avoir été la cause de la contamination de celui ou celle qui subira les graves conséquences d'une décision un peu trop individuelle.